Par Marie-Andrée Chouinard. Journal le Devoir
Le ministre se dit incapable d'ajouter une heure d'éducation physique pour combattre la sédentarité des jeunes
Le règlement du problème de sédentarité des jeunes passe par une augmentation du temps d'enseignement de l'éducation physique à l'école, ce sur quoi le ministre de l'Éducation a pour l'instant les mains liées
S'il affirme voir comme une «priorité» l'ajout de 60 minutes d'éducation physique de plus par semaine à l'école primaire et secondaire, Sylvain Simard croit devoir pour cela convaincre les profs d'augmenter le temps d'enseignement hebdomadaire global, en plus de trouver les 105 millions nécessaires à l'ajout de cette heure additionnelle.
Pourtant, cette «priorité» ne faisait en rien partie des annonces qu'a formulées hier un trio de ministres du cabinet Landry pour «favoriser la pratique d'activités sportives parascolaires en milieux défavorisés» et, par ricochet, diminuer le décrochage scolaire. Plutôt que d'augmenter le temps d'enseignement de l'éducation physique à l'école, Québec choisit d'injecter six millions par année -- sur quatre ans -- vers 225 écoles de milieux défavorisés, encourageant le milieu à composer un programme d'activités parascolaires non obligatoires destinées aux jeunes de l'école.
«Ce qu'ils ont annoncé [hier] matin, ce sont des activités parascolaires, et c'est bien ça le problème, a indiqué en après-midi Yves Potvin, enseignant d'éducation physique et porte-parole du Comité d'action EPS, qui prône un passage du temps d'enseignement de cette discipline de 60 à 120 minutes par semaine. Car les activités parascolaires demeurent facultatives. On n'enseigne pourtant pas le français à l'école en faisant des activités de français parascolaires.»
Le système actuel recommande 60 minutes d'éducation physique par semaine dans un total de 180 minutes par semaine dévolues aux «spécialités», parmi lesquelles le conseil d'établissement de l'école doit parfois faire des choix déchirants.
Il s'agit d'un dossier «prioritaire», concède le ministre Simard, qui rappelle lui-même que des 32 pays de l'OCDE, c'est le Québec qui compte le moins grand nombre d'heures d'enseignement. «Si on recevait du fédéral les correctifs que la commission Séguin évalue à 2,5 milliards, la centaine de millions nécessaires pour ajouter une heure d'éducation physique de plus seraient au-dessus de mes priorités», a expliqué M. Simard hier.
En attendant, le ministre espère que, «via le parascolaire, l'activité physique devienne une habitude de tous les jours», ce à quoi ne souscrit pas l'éducateur Yves Potvin, car «les enfants qui participent aux activités parascolaires sont déjà vendus à la cause, et les autres ne viendront peut-être pas, car ce n'est pas obligatoire».
Côté activité physique chez les jeunes, le diagnostic est pourtant bien sombre, ce à quoi tout le monde souscrit. L'obésité a triplé au cours des 20 dernières années chez les jeunes Québécois, 10 % des 6-16 ans en souffrant, 30 % d'entre eux victimes d'embonpoint. Si 40 % des jeunes de 12-13 ans ne font pas d'activité physique, ce pourcentage augmente à 60 % chez les 15-16 ans, des chiffres préoccupants.
Québec en forme, le programme annoncé hier, vise 225 écoles primaires et secondaires du Québec issues de milieux défavorisés, lesquelles n'ont pas encore été désignées. Les 24 millions nécessaires à sa mise en oeuvre -- sur quatre ans, la moitié est versée par Québec, l'autre par la Fondation Lucie et André Chagnon -- serviront à soutenir l'organisation d'activités parascolaires par l'ensemble du milieu, autour de l'école.
C'est l'escrimeur canadien Jean-Marc Chouinard qui est responsable de Québec en forme, dont le premier projet-pilote sera lancé dans une quinzaine d'écoles de Trois-Rivières en septembre prochain.